#12 RUE DU CHAT QUI DANSE

Il se releva lentement et se mit à marcher le long des murailles, conscient de la beauté de l'endroit, il prenait garde à ne perdre aucun détail du paysage. L'air marin lui caressait le visage tandis que des oiseaux décrivaient de belles figures dans le ciel éclairé par la ville qui s'allumait peu à peu. À sa gauche, il discernait une petite rue qui s'arrêtait juste au niveau des remparts et dont le nom lui fit esquisser un sourire : RUE DU CHAT QUI DANSE. Amusé, il s'arrêta un moment, et pour la première fois depuis de longues minutes, tourna le dos au soleil qui se couchait pour observer cette ruelle.

Il décida finalement de s'y aventurer, troublé par ce nom extraordinaire, il s'engagea pas à pas dans cette rue mystérieuse. Tout d'un coup, la pâle lumière du crépuscule laissa place à l'obscurité et il ne se repérait plus qu'à l'aide de la faible lueur de quelques lanternes disposées sur les côtés de la route. Le brouhaha ambulant de la ville touristique avait laissé place à un profond silence et au fur et à mesure qu'il remontait la rue, il remarqua qu'il ne croisait presque plus personne si bien qu'il se rendit vite compte qu'il était désormais probablement seul. Les lanternes se faisaient de plus en plus rares et il se retrouva dans une obscurité quasi totale. Une peur s'empara peu à peu de lui et il envisageait de faire demi-tour lorsqu'il aperçut, au bout de son chemin, une petite place ronde éclairée d'un halo lumineux dont il n'arrivait pas à comprendre l'origine. En se rapprochant, il repéra le regard scrutateur de deux yeux verts qui le fixaient depuis l'arrière du halo. Délicatement, un majestueux chat noir sortit de la pénombre et se mit à décrire des cercles sous la lumière. Il marchait d'une grâce féline, ses légères pattes semblant flotter sur les pavés. L'homme s'arrêta, fasciné devant cet imposant et élégant animal qui, toujours en le fixant de ses yeux verts, continuait de danser sous la lumière.

Le rire éclatant d'une jeune fille qui venait de le dépasser le fit retourner à la réalité et, plutôt déboussolé, l'homme regarda sa montre : il était tard et il commençait à ressentir le froid de la brise marine. Il regarda une dernière fois la rue en souriant, mit ses mains dans les poches de son manteau et reprit la route de son hôtel.